Le SDLC est fier d’avoir contribué à élaborer une déclaration commune des organisations professionnelles du livre françaises et allemande.

Au delà d’un préambule qui rappelle les enjeux sociétaux du livre et de la culture, nous rappelons les principaux sujets d’action et de réflexion qui mobilisent aujourd’hui les acteurs de la chaîne du livre.

Si le copyright est aujourd’hui, tant pour les éditeurs que les libraires, la question à régler de manière urgente, nous insistons sur le géo-blocage et sur l’interopérabilité des supports et des mesures de protection.

Enfin, toute la filière se rejoint pour soutenir le prix unique du livre physique et numérique, garant d’une juste rémunération des auteurs, éditeurs et libraires.

Voici le texte de la déclaration :

Déclaration de Berlin des organisations professionnelles du livre françaises et allemandes

Journées du livre de Berlin le 13 juin 2017

Syndicat national de l’édition, Syndicat de la Librairie Française, Syndicat des Distributeurs de Loisirs Culturels et Börsenverein des Deutschen Buchhandels e.V.

Préambule           

Il n’est point un domaine qui n’ait fait l’objet d’un livre. L’industrie du livre en France et en Allemagne propose des ouvrages dans tous les domaines de la vie. Son objectif demeure plus que jamais d’apporter une contribution précieuse à la réussite d’une société libre et démocratique.

Cette ambition est aujourd’hui possible parce que les acteurs de la chaîne du livre et de l’édition travaillent dans des cadres juridiques et économiques qui permettent la diversité et stimulent la créativité. Ce contexte a été acquis grâce à une protection forte du droit d’auteur et une politique de prix unique garantissant une juste rémunération des auteurs, des libraires et des éditeurs et par la prise de risque entrepreneuriale, garante d’une création éditoriale permanente.

Depuis plusieurs années, les lourds investissements réalisés en particulier dans le développement du numérique ont pour objectif de mettre à profit les grandes opportunités offertes par le numérique à l’industrie du livre, et par conséquent, à nos sociétés, pour permettre aux lecteurs d’avoir un accès optimal aux contenus, développer de nouveaux emplois et favoriser la mise en place de nouvelles réussites européennes.

Cependant, sous l’influence notamment des géants américains de l’Internet, l’idée de pouvoir utiliser des contenus gratuitement, immédiatement et partout, gagne du terrain dans les esprits comme dans les pratiques. Si la fourniture immédiate de contenus indépendamment de la localisation de l’utilisateur est un but poursuivi par l’industrie du livre et sert son souci d’amener un public à découvrir de nouveaux contenus de qualité, il est illusoire de croire que cela puisse se faire gratuitement. Si les investissements dans l’offre ne sont pas rentables, cette dernière disparaîtra.

Le travail des auteurs, des éditeurs et des libraires mérite un cadre juridique qui rende possibles à la fois rémunération et investissement, créativité et esprit d’entreprise dans le respect de la viabilité économique de chacun.

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L’année 2017 est particulièrement importante pour l’industrie du livre allemande et française.

En effet, Bruxelles pose aujourd’hui des jalons qui devraient simplifier l’accès aux contenus à l’ère du numérique. La Commission européenne a présenté son projet de réforme pour le marché unique numérique qui compte plusieurs étapes actuellement en cours d’exécution et de délibération.

Les représentants de l’industrie du livre allemands et français accompagnent le processus de réforme et se félicitent de sa mise en œuvre. Toutefois, compte tenu du débat actuel, ils demandent aux Etats membres et au Parlement Européen d’examiner et de voter des textes pondérés et proportionnés.

Les structures de publication innovantes et qui fonctionnent, en France, en Allemagne et dans de nombreux autres États membres, ont évolué au cours des siècles : elles ont accompagné chaque étape de la construction européenne et contribué à l’extraordinaire richesse éditoriale de l’Union. La volonté de mettre en place un marché numérique unique et harmonisé doit également s’attacher à préserver les garanties essentielles de la diversité culturelle et de l’identité en Europe, afin que perdurent ces structures qui ont fait sa richesse et son rayonnement culturel et industriel.

La viabilité de l’industrie du livre en Europe ne peut être garantie que par une approche clairvoyante et réfléchie du processus de réforme.

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C’est la raison pour laquelle nous, représentants de l’industrie du livre allemande et française, demandons aux dirigeants politiques de nos deux pays de préserver l’équilibre de l’écosystème du livre. Dans cette perspective, il s’agit prioritairement de maintenir le cadre juridique du droit d’auteur, en tant que facteur d’innovation, de liberté d’expression et de diversité culturelle. Et de réaffirmer un engagement clair en faveur du respect, par l’ensemble des acteurs, des règles en vigueur sur le prix unique du livre, dispositif vital pour la diversité de la création éditoriale et sa diffusion auprès du public le plus large, notamment grâce à la présence d’un réseau de librairies sur l’ensemble des territoires.

Plus précisément, nous appelons à

  • Maintenir les systèmes juridiques déjà existant pour les auteurs et les éditeurs au sein de sociétés de gestion collective en permettant expressément aux éditeurs de toucher une part des revenus de la gestion collective car ils sont les détenteurs de droits cédés.
  • Reconnaître l’éducation comme l’une de nos richesses culturelles les plus essentielles et des outils d’enseignement polyvalents et de haute qualité des éditeurs comme un élément fondamental de la qualité de l’éducation. Au vu des exceptions au droit d’auteur actuellement envisagées, il est à craindre que le contraire se produise et que l’on tire le tapis économique sous les pieds des éditeurs éducatifs et scientifiques.

 

 

 

–              Reconnaître la valeur et la diversité du contenu organisé et préparé comme base d’une opinion indépendante et pluraliste afin de promouvoir l’avenir d’une industrie du livre critique et engagée. Des possibilités d’accès abusives pour les utilisateurs et les institutions sans licence compromettraient les investissements dans le secteur.

  • Garantir que les offres de licence diversifiées et flexibles des éditeurs prévalent sur les exceptions. Seule la méthode contractuelle peut assurer une rémunération équitable et raisonnable des auteurs et des éditeurs et, par conséquent, des offres de qualité pour les étudiants, les enseignants et les chercheurs.
  • Renforcer le rôle des librairies indépendantes avec un mandat de politique culturelle et éducative.
  • Exclure du règlement « geoblocage » les contenus protégés par le droit d’auteur, tels que les livres électroniques. Si le texte actuel était adopté, il obligerait le vendeur à servir de la même manière tout client européen, et donc à réaliser des investissements disproportionnés par rapport à la taille du marché du livre numérique, que seuls les plateformes multinationales non européennes seront en mesure de réaliser, au détriment des petites et moyennes entreprises.
  • Permettre une bonne articulation entre la législation européenne sur l’accessibilité et les textes européens transposant le Traité de Marrakech sur l’exception au droit d’auteur pour les personnes handicapées. Il s’agit d’éviter d’occasionner des charges excessives pour les entreprises et de tenir compte des contraintes techniques pour être flexibles et viable à long terme.

 

  • Imposer dans la directive relative à la fourniture de contenus numériques, le principe d’interopérabilité au niveau des formats, des mesures de protection techniques des livres électroniques et des liseuses. Et ce pour assurer le respect de la concurrence loyale et de la liberté de choix du lecteur.

 

  • Travailler ensemble pour une mise en œuvre rapide de l’initiative actuelle de la Commission européenne pour un taux réduit de TVA pour les publications électroniques.

Nous appelons les gouvernements de la République française et de la République fédérale d’Allemagne à inclure ces points dans leurs discussions communes et à en tenir compte, au nom d’une politique européenne du livre favorisant la diversité culturelle sur le long terme. La tâche des éditeurs et libraires pour un marché ouvert avec des contenus de haute qualité est plus importante que jamais, en particulier à l’ère des « vérités alternatives » et de la désinformation.